"Notre créneau ? C'est l'aluminium !" - Damien Dambournet
Entretien avec Damien Dambournet du laboratoire Physicochimie des Electrolytes et Nanosystèmes interfaciaux (Phenix).
Entretien réalisé le 23 novembre 202
Votre projet est lauréat d'une bourse exploratoire financée par l'institut. Dans quel axe thématique de l'iMAT avez-vous déposé votre dossier ?
Notre projet de recherche a été déposé dans l'axe thématique Énergie, environnement, durabilité. Plus précisément, nous voulons développer de nouveaux dispositifs électrochimiques rechargeables. La recherche sur les batteries rechargeables est très dense, surtout depuis les dernières décennies, mais elle se concentre principalement sur le lithium. Notre projet est d'étudier la possibilité de créer des batteries avec de l'aluminium.
Fiche projet
Titre : Modulating the structural dimensionality in complex oxides to enable reversible aluminium ion intercalation
Appel à projet : bourse exploratoire, 2020
Axe thématique : Énergie, environnement et durabilité
Pourquoi l'aluminium ?
A vrai dire, plusieurs arguments pointent en faveur de l'aluminium pour jouer un rôle dans les batteries à venir : d'une part l'ion aluminium Al3+ est particulièrement intéressant en raison de la grande abondance de l'aluminium sur Terre et d'autre part il possède une densité énergétique volumétrique théorique élevée, ce qui lui confère un très bon rendement énergétique à côté du lithium.
Damien Dambournet
La recherche sur les batteries de smartphone ou de voiture se concentre sur le lithium. Notre créneau à nous, c'est l'aluminium !
Mais alors, pourquoi les batteries à l'aluminium ne se sont-elles pas déjà développées massivement ?
Le développement des piles à l'aluminium est rendu très difficile par le pouvoir polarisant de l'Al3+. Il est beaucoup plus élevé que celui du lithium et rend les interactions électrostatiques de l'aluminium beaucoup plus forte dans le matériau hôte d'intercalation (1) : ce matériau est le matériau dans lequel se déplacent les ions pour la charge et la décharge de la batterie..
Cette interaction plus forte de l'Al3+ induit une barrière de diffusion à haute énergie et une diffusion lente de l'état solide dans la structure de l'hôte. Et la plupart des composés d'intercalation connus pour accommoder de façon réversible le lithium n'ont pas réussi à être électrochimiquement actifs par rapport à l'aluminium.
Votre sujet s'inscrit donc dans une champ de recherche vierge ?
C'est ce qui est très intéressant dans ce projet : il reste tout à faire, et quoi qu'on trouve, ce sera intéressant et exploitable.
Dans mon labo, il y a déjà eu une thèse et un postdoc entièrement consacrés à cette recherche et nous avons déjà des publications. L'idée maintenant est de continuer d'étudier et de comprendre comment la chimie de l'aluminium pourrait se conjuguer avec le développement de nouvelles batteries et surtout de comprendre comment contourner cette difficulté du matériau d'intercalation.
Quel est l’origine du projet ?
C'est aussi une collaboration avec un laboratoire allemand de la Technische Universität Berlin qui nous a mis sur la piste de ces recherches sur l'aluminium. Et nous faisons partis du réseau RS2E qui depuis quelques années favorisent des recherches plus prospectives et donc nous a indirectement encouragé dans cette voie.
Déjà des idées sur l'investissement de la bourse ?
Nous pensions a un stage de Master, mais vu la crise sanitaire, nous allons probablement plutôt investir dans des produits chimiques et des petits équipements pour designer des cellules électrochimiques.
(1) l'intercalation est une insertion réversible, ici d'un ion Al3+, dans un matériau.